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20 février 2016 6 20 /02 /février /2016 09:15
Fauteuil de Merlin
Fauteuil de Merlin

Pesant, son pas. Pesante sa façon de s'asseoir sur la balancelle. D'ailleurs la balancelle ne s'ébranle pas. Statique, la balancelle. Pesant, soudain, le silence. La fontaine a-t-elle entendu cette "pesance lourde" ? Peu à peu son chuchotis s'éteint. Pesante, l'ambiance.

Moi Loizo, sur une feuille de mon palmier, je me tais. Je sais qu'il peut n'y avoir nul besoin de répondre au silence. Mais là, je vais le rompre. Une perle de cristal coule sur la joue droite de mon amie Lodile. J'ose un "Bonjour Lodile comm'..." Elle m'interrompt aussitôt.

"Mal Loizo ! Mon amie Mariessoleil a demandé une entrée en hôpital "Si" pour se protéger, pour s'empêcher d'agir, cela fait trois mois que l'idée lui tourne en tête" m'a-t-elle dit. Te rends-tu compte Loizo, Mariessoleil, toujours sourire aux lèvres, toujours couleurs en corps, toujours des "bonjour" d'un trottoir à l'autre, d'un bout de bus à l'autre, et sa voix rauque, éraillée qui faisait, non, qui fait répondre tout un chacun. Oui, Mariessoleil, Loizo !

Hier, je suis allée la voir. Pas simple d'arriver jusqu'à elle "Mais si c'est facile, je te donne un repère, une grosse boule, pour ne pas la perdre sûrement, ils ont de l'humour dans cet hôpital !" Je deviner qu'elle se marre. Elle a encore de l'humour. Rien n'est perdu. "Ok tu ne l'as pas perdue la boule toi" Et elle continue de me driver "A Quatre John tourne à gauche". J'ai suivi John un temps, j'ai imaginé qu'il était bel homme. Soudain je ne l'ai plus vu. "Quand tu ne sais pas quoi jouer, joue de l'atout... autant dire quand tu ne sais pas où tu vas, vas tout droit", dit-on, j'ai poursuivi tout droit et je suis tombée sur François Rabelais. A sa seule lecture, j'entends des bêlements partout mais les pelouses sont nues ; je soupçonne des fouaces en veux-tu en voilà qui glissent au-sessus de ma tête et des noms bizarres s'arcboutent d'un neurone à l'autre : Gargantua,

https://youtu.be/Go-UTQczmEk

Gargamelle, le pays de Grangousier, Frogier le berger je te laisse cher Loizo et toi cher lecteur ou lectrice retrouver Frère Jean des Entommeurs, le château écrasé par une queue de cheval, je crois, et surtout Gymnaste l'écuyer qui se fait passer pour fou. Je ne pouvais pas ne pas l'évoquer celui-là, en traitant mon sujet.

https://www.youtube.com/watch?v=pGbh2q1lohE

Mais bref, LOizo, bien que ces rencontres et ces combats me ravissent tu comprends combien plutôt émue d'être dans ces lieux, je me sens perdue. J'appelle Mariessoleil. La voix douce d'une infirmière me remet sur les rails. Je remonte le chemin un tiers à l'envers et d'un coucou, je reconnais sa voix et son bras qui s'agite. J'étais contente mais j'ai la peur m'a envahie. Elle me saluait d'une terrasse grillagée. Un temps j'ai cru plonger dans un film.

L'univers est sous clef. Que fait-elle là notre Mariessoleil ?

Avec ma veine me voilà prise à partie par un jeune homme en pyjama qui me demande d'avoir la gentillesse d'aller à la gendarmerie pour dire qu'il ne doit pas être ici. Je m'étonne. Il est très proche de moi et aucun des quatre membres du personnel n'agit. Je fais confiance à leur immobilisme professionnel. Je hoche la tête dans une banale connivence. Cela semble lui suffire. Je pénètre dans la chambre de Mariessoleil et là je manque m'étouffer. Je déteste les salles rectangulaires. Elle est rectangulaire. Son lit une place à gauche fait face à un mur d'une neutralité déconcertante. Un autre lit, celui de sa coloc fait face au même mur mais jouit d'une fenêtre avec vue sur le parc. Entre chacun des lits un grand espace et deux armoires d'un marron glauque, années 1950 achetées sûrement chez Emmaus. Que fait-elle là notre Mariessoleil ? Sa voisine est absente. Nous échangeons un regard. J'écarquille les yeux "Que fais-tu là ? Pourquoi pas X ou Y " je cite deux autres établissements. "Allez viens" me dit-elle, "j'ai le droit de sortir". Nous nous retrouvons dans le parc.

Comme l'une de mes soeurs, Mariessoleil me confie remarquer grâce à moi, des choses auprès desquelles elle passe sans les voir. C'est vrai que de mon côté, même un ver de terre frétillant (ou pas) attirerait mon regard et me ferait rire. Et là, vois-tu Loizo, ma propre fille, ma Dyane, sait me dire que cette façon de voir une autre réalité est insupportable. J'accepte qu'elle me dise cela. Ce qui est, dans l'instant, c'est que Mariessoleil prend plaisir à découvrir

un délicieux pavillon, qu'on pourrait croire minuscule, extrait d'un livre anglais pour bébé ou d'un film pour enfant, pourquoi pas de Hans et Gretel, tout comme l'arbre, saule pleureur dénudé qui jouxte le pavillon ;

et "la marche de l'Homme", une sculpture gris ardoise, haute, étroite à plate, rectangulaire et largement fendue en son milieu, souvenir d'une certaine "Tombées de la Nuit", festival bien connu ici.

Elle parle ma Lodile, elle ne s'arrête plus. J'écoute. Et je pense à vous. Envie de boire ? Envie de goûter.... les boissons sont comme toujours au frais du bassin, et le plateau thé à la menthe et pâtisseries orientales, sous les grandes feuilles de bardane. Servez-vous, YA+KA... bientôt.

"Tu sais Loizo", Je tends l'oreille, la balancelle se remet en marche, "j'ai bien vu que Mariessoleil avait changé, j'ai bien vu que les étoiles n'habitaient plus son regard. Mais c'est passager. Il lui faut une lampe de luminothérapie. Il doit bien y en avoir dans cet hôpital. Je lui ai dit "si tu ne demandes rien, on ne te donnera rien, tu as perdu le désir, alors je te donne un ordre demande quelques séances de luminothérapie, demande Mariessoleil" Elle m'a souri. Et comme nous étions dans un rayon de soleil auprès duquel elle passait sans s'arrêter, j'ai appuyé sur son bras et je lui ai dit "ferme les yeux, sens-tu la chaleur des rayons sur ton front ? Laisse-la pénétrer dans ton corps"

Rien n'est perdu Loizo. Mariessol a joué le jeu. Je reviendrai.


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19 juin 2014 4 19 /06 /juin /2014 21:33
  • Thorigné-Fouillard, il y a quinze jours, je l'ai manqué ;
  • La Roche sur Yon, la semaine dernière, j'ai pensé ;
  • Saint jacques de la Lande aujourd'hui à l'Aire Libre il y était, moi aussi. Mais ce fut un peu just.

Quitté Betton, un peu just ; De la place hoche à République, en quasi courant ; mince le bus tarde ; quand il arrive, il est bondé, 7 stations plus tard, il est contrôlé. Petite histoire dans l'histoire. Ma jeune voisine, avec laquelle nous partageons le même siège change de visage. Et me glisse : "mince il y avait tant de monde que je n'ai pas acheté de billet". A tout hasard je regarde dans mes affaires "Tenez, prenez celui-ci, je vous le donne" C'est vraiment un hasard : je n'ai pas besoin d'acheter de ticket. Je n'en ai jamais. Elle ouvre de grands yeux ronds et me remercie comme si je lui avais donné tout l'or du monde. Puis je la vois farfouiller dans son sac et quand elle me rend de la monnaie je n'en reviens pas. N'ai-je pas dit "je vous le donne ?"

Drôle à un arrêt un jeune homme s'engouffre dans le bus. Il n'a pas de ticket. Le contrôleur lui colle une amende. Le pauvre, il n'a pas eu le droit au ticket salvateur. Je n'en ai plu. Coût de l'amende 63.40.

Petite conversation :

  • "Vous n'aviez pas vu que nous étions là jeune homme, vous vous êtes jeté dans la gueule du loup"
  • "C'est clair, si je vous avais vu je ne serais pas monté" CQFD.

Soudain, l'autobus se vide. J'interroge le conducteur "Est-ce le terminus ?" "Oui dans un arrêt" répond-il. Je cogite. Un arrêt ? Je ne serai pas encore arrivée. Et il est déjà 19 h 02. Je vais être en retard. Le chauffeur lit mon état d'âme. Il me dit qu'il existe un autre bus qui me laissera peu avant le théâtre. Super. Merci . Au revoir monsieur. Beau hasard, cinq minutes plus tard, le bus apparaît. Mais pourquoi ai-je mis ces espadrilles qui me font tant souffrir.

J'entre à l'Aire Libre et j'avale l'escalier, la dernière.

Ce n'est pas un spectacle, mais je le savais ; Maël Legoff accueille le public. Sur la scène la reproduction de l'annonce faite à Marie donne le ton. Celui du travail, donc de l'impro avant l'écriture du texte. Yannick Jaulin cherche encore. Le public rit. Moi aussi. Bien que, c'est vrai, le sujet me fasse plus réfléchir que rêver, capacité du conte. Preuve en est, le silence qui a pénétré les gradins quand il a parlé de la vieille Misère et son plumé (traduire pommier). Cependant, piqure est faite. Rendez-vous en février 2015. Avec plaisir.

Je repars en échangeant quelques phrases avec une charmante spectatrice émue et étonnée par ce qu'elle venait de découvrir : la parole du conteur. Oui, elle est bonne. Oui, elle fait du bien. Vive les conteurs.

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  • : Bavard'oseuse ou l'ordinaire d'une vie
  • : Lodile et Loizo L'un dit. L'autre "Mar-dit aussi"
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